Association Mahuzier autour du Monde, janvier 2012.
Depuis la randonnée de l’Association Mahuzier autour du Monde à Castres et à Roquecourbe (Tarn), en 2003, on sait les origines languedociennes de la famille Mahuzier. François de Lannoy, dans le tome premier de ses Recherches sur la famille Mahuzier (1988), a identifié le premier membre connu de notre famille, Raymond Mahuzies, né à Roquecourbe entre 1540 et 1550, et qui possédait une vigne.
Raymond a engendré trois fils dont un certain Jean. Jean à son tour a engendré cinq enfants dont Étienne et Daniel. Au début du XVIIe siècle, Étienne a donné naissance à la Branche aînée, par la suite émigrée à Castres (10 km de Roquecourbe), dite Les Mahuzier de Castres, qui y a prospéré. Daniel, né en 1614, est à l’origine de la Branche cadette dont un premier rameau est resté à Roquecourbe. Le second rameau de la Branche cadette, à l’origine de la lignée de notre association, a quitté Roquecourbe au XVIIIe siècle pour s’établir à Bergerac. Nos Mahuzier y sont restés jusqu’à la seconde moitié du XIXe siècle.
En 1845, Jean-Gustave Mahuzier (1823-1885) s’est enhardi, lui, à doubler le cap Horn pour s’enraciner au Chili. Bergerac est donc le point de départ de la Branche chilienne. Ce qui vaut bien qu’on y accomplisse un pèlerinage. Déjà, en janvier 2012, trois Mahuzier du Chili apparentés à Juan Gustavo se sont inscrits pour des retrouvailles à Pâques 2012.
Roquecourbe, le berceau de la famille, situé au bord de l’Agout, affluent du Tarn qui se jette dans la Garonne, s’adonnait depuis des temps immémoriaux au travail de la laine. Ce n’était pas sans danger car les brebis pouvaient transmettre aux hommes la terrible maladie du charbon. D’après François de Lannoy (fils d’Anne Mahuzier) qui reprend l’étymologie suggérée par Dauzat, le nom de Mahuzies viendrait de : « la maison du heusier ». Littré définit ainsi les houseaux qu’il fabriquait : « sorte de chaussures de jambes contre la pluie et la crotte ». De tricoteurs de bas de laine, les Mahuzies les plus avisés (Branche de Castres) sont devenus des bonnetiers, des maîtres bonnetiers puis des marchands bonnetiers. Ils se sont enrichis, ont pu arrondir leurs biens, contracter de brillantes alliances, devenir notaires, entrer dans l’armée, briguer le sacerdoce. Car ceux-là ont vite abjuré la religion prétendue réformée (RPR) dont Roquecourbe était un des plus farouches bastions. On connaît les dragonnades, les ravages qu’ont faits les guerres de Religion en Languedoc. Mais la religion du plus fort est toujours la meilleure.
En ce qui concerne notre Branche cadette, on dit que Jean Mahuzies (né en 1711) abjura quatre fois le calvinisme. N’est pas renégat qui ne veut pas. Son fils Bernard (1749-1821), las des brimades et discriminations, quitte Roquecourbe et s’installe à Bergerac où il épouse, en 1779, Marguerite Taver et où les scribes par inadvertance changent son nom de Mahuzies en Mahuzier (même prononciation). Le fils de Bernard et de Marguerite, Jean-Bernard, devenu Mahuzier par la force des choses, épouse une catholique de bonne famille, Anne Falquier. Les enfants sont baptisés catholiques et voilà la famille rentrée dans le giron de l’Église apostolique et romaine et prompte à rejoindre la bourgeoisie aisée. Le fils aîné, Jean-Henri (1819-1864) sera le père de l’ancêtre Albert (1851-1912) qui épousa Thérèse d’Algay. Le deuxième fils, Jean-Gustave (1823-1885), on l’a vu, succombe à la tentation de l’Aventure et crée la lignée du Chili. Le troisième fils, Jean-Germain, qui avait accompagné son frère aux Amériques, et puis est revenu en France, s’illustre dans la saga familiale en tant que père de deux demoiselles, Mathilde et Léonie Mahuzier, appelées à diriger une institution de jeunes filles, très réputée à Paris, le Cours Désir. D’où le nombre de filles Mahuzier qu’on y inscrira !
Chantal Pou, dépouillant avec sa mère (Anita), et ses sœurs, les archives de son grand-père Henri Mahuzier nous a fourni une raison supplémentaire d’organiser un pèlerinage à Bergerac :
La Branche chilienne souhaitait faire connaître la France à ses descendants. Ainsi, en 1913, Carlos Mahuzier y Murillo (1864-1954) et Elena Cousin de Kermarec s’embarquent à Valparaiso avec leurs cinq enfants. Les deux fils aînés, Raul et Carlitos, s‘ennuient au domaine du Mont de Neyrat, situé non loin de Bergerac entre Moncuq et Pécharmant, qui ne saurait rivaliser avec leur propriété du Chili. Ils repartent pour leur belle Quinta. Leurs sœurs, Yvette et Nénette (Elena Maria) sont ravies d’être en France. Gustavo est encore petit (il a treize ans). Carlos commence par mettre Yvette au Cours Désir. C’est alors qu’un jeune cousin de vingt et un ans, Henri Mahuzier, petit dernier de la famille d’Albert et Thérèse d’Algay, suggère à sa jeune et jolie cousine chilienne de faire un échange : « Vous m’enseignez l’espagnol, je perfectionne avec vous votre accent français ».
1914, la guerre éclate entre la France et l’Allemagne. Henri, qui maîtrise déjà plusieurs langues, est enrôlé comme interprète. Les Chiliens sont bloqués à Bergerac. Aucun bateau ne se risquerait à affronter les sous-marins allemands qui rodent dans l’Atlantique. Carlos et Elena ne peuvent même plus compter sur l’argent que les garçons devaient leur faire parvenir régulièrement. La famille est sans le sou. Mais Yvette et Henri correspondent assidument. A la fin de la guerre, ils se marient. Ils auront deux enfants : Anita et Yvonne.
Pendant ce temps-là, au Chili, les garçons n’ont pas su gérer le patrimoine familial. Carlos est complètement ruiné. Elena, sa femme, meurt à Bergerac, en 1932. Il rentre seul au Chili. Comble de malheur, un tremblement de terre, en 1939, détruit La Quinta de fond en comble. La municipalité de Concepción s’empare des terrains afin d’y bâtir un lotissement. En compensation, on donne le nom de RUE MAHUZIER à la percée qui traverse le nouveau quartier. Une expédition des Mahuzier de France organisée par Alain a photographié la plaque.
Autre raison d’un pèlerinage à Bergerac, qui intéresse particulièrement les descendants de Gaston Mahuzier (frère d’Henri) : la naissance en ce lieu, le 11 août 1908, de Janine Mirio, qui épousa l’Explorateur Albert Mahuzier (1907-1980). Son père, Henri Mirio, après ses études à Saint-Cyr, fut envoyé en garnison à Bayonne, au Maroc, à Rodez (où naquit la mère de Vévé), à Bergerac de 1905 à 1910, avant d’être affecté à Saint-Malo. Pendant la guerre de 1914, à la tête de ses régiments d’infanterie, il mérita la croix de guerre, avec citation, et fut promu officier de la Légion d’honneur. À Bergerac, la famille Mirio habitait 27 cours Victor-Hugo, non loin de la Dordogne.
Janine Mahuzier.s
Boulogne, janvier 2012.